Voilà de quoi compliquer encore un peu la tâche du gouvernement qui entend s’attaquer aux habitudes d’épargne des français pour réorienter leurs avoirs vers le financement des entreprises. Amateurs d’épargne liquide et peu risquée, les Français se sont tournés encore massivement vers les livrets d’épargne dont le taux est réglementé par l’Etat pour placer leurs économies en 2016. Et début 2017 le mouvement s’est encore renforcé avec le retour en grâce du Livret A.
Selon le rapport annuel de l’Observatoire de l’épargne réglementée publié par la Banque de France ce mercredi, la croissance des avoirs placés sur ces livrets – qui concentre 14,8% des économies des ménages – atteint 3,2% sur un an à fin mai. Un rythme qui contraste avec le coup de frein du Livret A en 2015 et qui, conjugué au succès des comptes courants, gonfle davantage la réserve d’épargne liquide des Français.
Ce succès, l’épargne réglementée le doit d’abord à son taux et en particulier à celui du plan épargne logement (PEL). Revu à la baisse à plusieurs reprises ces dernières années pour tenir compte de la politique de taux zéro de la BCE, la rémunération de ce placement (contrairement à celui du Livret A) n’a baissé que pour ses nouveaux souscripteurs.
En conséquence, le PEL offre toujours une rémunération de 2,76% en moyenne! Un luxe que peu de livrets peuvent offrir en cette période de taux bas. Les épargnants en ont logiquement profité en 2016, à tel point qu’à la fin de l’année l’encours du PEL dépassait celui du Livret A. Une première depuis 2008.
Ces derniers mois, le Livret A, porté notamment par les incertitudes politiques, a toutefois pris le relais : depuis janvier le placement a collecté . Globalement, avec un taux moyen de 1,51% servi aux épargnants, l’épargne réglementée assure un triptyque fiscalité, sécurité et rémunération acceptable aux yeux des épargnants en période de taux bas. D’autant que le gouvernement s’est engagé à maintenir la défiscalisation des fonds placés sur les Livrets A.
Pour le gouverneur de la Banque de France qui a encore plaidé début juillet, dans sa lettre adressée au président de la République pour redéployer « » une partie de l’épargne des français , il n’y a donc pas vraiment de quoi se réjouir. D’autant qu’au premier semestre, les épargnants ont encore engrangés 27,7 milliards d’euros sur leurs comptes courants. C’est d’avantage que les 18,4 milliards enregistrés à la même période, l’an passé.
Pour l’instant, les signaux qui laissent à penser que les Français pourraient être plus ouverts à la prise de risques se situent surtout du côté de l’assurance-vie. Incités par les assureurs – contraints de réduire leurs risques en période de taux bas – les Français ont continué de plébisciter les contrats en unité de comptes en 2016, quoique plus modestement qu’en 2015. Début 2017, la collecte a néanmoins repris de plus belle, pour atteindre 8,7 milliards d’euros sur cinq mois.
©2017 Les Echos – SHARON WAJSBROT