Le retour du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale ce vendredi annonce un nouveau débat houleux sur la fiscalité du capital. Lors de l’examen en commission des Finances, les députés ont supprimé le mécanisme anti-abus voté au Sénat sur le prélèvement forfaitaire unique de 30 %. La mesure, introduite par le rapporteur du Budget, Albéric de Montgolfier (LR), consistait à réintégrer dans la base d’imposition au barème progressif tout dividende qui dépasserait 10 % du capital. Le sénateur souhaitait prévenir des comportements d’optimisation fiscale de la part de contribuables (chefs d’entreprise, indépendants) qui auraient intérêt à recevoir leur rémunération sous forme de dividendes plutôt que de se verser un salaire.
Le gouvernement avait initialement vu passer cette disposition anti-abus avec bienveillance. Après une expertise plus approfondie, les députés de la majorité ont rejeté ce mécanisme, considérant que le seuil de 10 % risque de créer des effets de bord négatifs, explique le rapporteur du Budget à l’Assemblée, Joël Giraud (LREM). L’autre effet pervers concerne les transmissions d’entreprises, qui passent souvent par une remontée de dividendes. « On nous a remonté de nombreux cas pratiques pour lesquels cet amendement aurait compliqué les choses », indique Amélie de Montchalin, coordinatrice du groupe LREM à la commission des Finances. Les députés ont également identifié des risques de contentieux importants, dans la mesure où la valorisation des sociétés non cotées s’avère parfois complexe.
La majorité ne nie pas la nécessité d’introduire un dispositif anti-abus mais elle souhaite le faire dans un prochain texte en 2018, soit le projet de loi Entreprises préparé par Bruno Le Maire pour le printemps, soit le projet de loi de finances 2019. Les députés considèrent que le décalage d’un an entre le versement du dividende et le paiement de l’impôt leur donne du temps pour bâtir un autre mécanisme. « Il faut que cette mesure ne soit pas excessive, qu’elle tourne et qu’elle ne décourage pas des comportements que nous souhaitons encourager », défend Amélie de Montchalin.
©2017 Les Echos – INGRID FEUERSTEIN