
Une page est bel et bien en train de se tourner pour les particuliers en quête d’un crédit immobilier. Pour le troisième mois consécutif , les taux d’emprunt repartent à la hausse, à 1,38 % en moyenne en janvier, contre 1,34 % le mois précédent (toutes durées confondues et indépendamment du coût des garanties et des assurances) selon l’Observatoire Crédit Logement / CSA. Le mouvement n’est pas bien brutal mais reste inhabituel pour les ménages biberonnés depuis la mi-2012 à de très longues périodes de baisse des taux. A noter que cette hausse concerne tous les emprunteurs, qu’ils empruntent sur des durées courtes ou beaucoup plus longues pour les ménages jeunes et modestes.
Retour de l’inflation
Comment expliquer cette nouvelle tendance ? La progressive remontée de l’OAT 10 – le taux auquel la France emprunte à dix ans – n’y est pas étrangère. Encore proche de 0,1 % en septembre dernier, ce taux est repassé au-dessus de 1 % à la fin du mois de janvier, pour la première fois depuis décembre 2015. Si les banques observent le coût des emprunts d’Etat à dix ans, c’est qu’il donne une idée du coût d’un placement faiblement risqué sur cette période. Cet indicateur est assez pertinent pour un crédit immobilier puisqu’en général, les ménages remboursent justement leur crédit au bout d’une dizaine d’années (même s’ils ont emprunté sur quinze ou vingt ans) lorsqu’ils achètent un nouveau logement et obtiennent donc un nouveau prêt
En remontant les taux, les banques indiquent aussi qu’elles cherchent peu à peu juguler les rachats de crédit immobilier. Il s’agit, à la faveur des taux faibles, d’obtenir un taux plus intéressant pour un prêt déjà existant, ou alors de le faire racheter par une banque concurrente. Les prêteurs ont longtemps dû jouer le jeu, au risque de perdre leurs clients. Avec la remontée de l’OAT, le moment est tout trouvé pour ralentir la cadence. Enfin, des effets saisonniers peuvent aussi entrer en compte, puisque nous ne sommes qu’en tout début d’année et que les banques consentent habituellement davantage d’efforts au printemps, la haute saison pour les achats de logement.
Reste que, malgré ces tendances lourdes, l’emprunt immobilier reste très attractif pour les ménages. Même à 1,38 % en moyenne, le coût du crédit se maintient à des niveaux historiquement faibles, d’autant que le retour de l’inflation – après deux années de quasi stagnation des prix – vient encore rogner la facture (en taux réel, c’est à dire en retirant l’inflation du taux facial du crédit). Surtout, la politique monétaire de la BCE ultra-accommodante reste d’actualité, et les banques peuvent donc toujours se financer à des conditions très attractives. Cela leur permet toujours d’accorder des prêts bon marché..tout en augmentant leurs marges.
©2017 Les Echos – EDOUARD LEDERER